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L’égalité des genres, objectif prioritaire de la politique de développement

Le Conseil fédéral adopte la position de la Suisse sur un cadre pour un développement durable après 2015

Abstract

Auteure : Irene Grohsmann

Publié le 18.09.2013

Synthèse :

  • Consultée par les Nations Unies, la Suisse a défini ses quatre objectifs majeurs pour l’après-2015 en matière de développement dans le monde.
  • L’égalité des genres y côtoie la santé, la sécurité de l’eau et la paix.
  • Les priorités définies par les Etats membres seront discutées au niveau de l'ONU avant que l’Assemblée générale n’opère un choix définitif parmi les objectifs formulés durant l’hiver 2013-2014.

Historique

Il y a un peu plus de dix ans maintenant, les Nations Unies adoptaient les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), que les Etats membres devaient réaliser à l’horizon 2015. Assorti de cibles précises et d’indicateurs mesurables, ce nouvel instrument de la gouvernance internationale avait pour vocation de servir de lignes directrices aux institutions chargées de sa réalisation. Dans la Déclaration du Millénaire adoptée en septembre 2000, les Etats s’engageaient à réduire de moitié la pauvreté et à promouvoir le développement dans le monde d’ici 2015.

Pour concrétiser cet engagement, le Secrétaire général de l’ONU proposait en 2001 8 objectifs, 18 cibles et 48 indicateurs. Depuis cette date, les OMD sont le principal cadre de référence de la coopération au développement. Ces objectifs mesurables ont réussi le tour de force d’attirer l’attention de la communauté internationale sur les huit domaines prioritaires choisis et de mobiliser des ressources susceptibles de combler les principales lacunes en matière de développement. Quelques indicateurs sont d’ores et déjà atteints, d’autres – et ils sont nombreux – le seront vraisemblablement d’ici 2015 et d’autres encore ne le seront très probablement pas.

Malgré toutes les critiques dont ils ont été l’objet, les OMD sont aujourd’hui considérés comme une réussite et comme une preuve qu’on peut accélérer le développement en définissant des objectifs valables dans le monde entier. Les Nations Unies ont d’ailleurs déjà commencé à parler des objectifs à définir après 2015 (agenda pour l’après-2015).

En parallèle, la Conférence des Nations Unies sur le développement durable de 2012 (Rio+20, soit vingt ans après la Conférence des Nations Unies sur l’environnement et le développement tenue à Rio de Janeiro, plus connue sous le nom de Sommet de la Terre) a lancé une initiative poursuivant une finalité similaire: les Objectifs de développement durable (ODD). Puisqu’ils sont applicables à tous les pays du monde, ils fixent des buts à atteindre aussi pour les pays développés, contrairement aux OMD qui concernaient seulement les pays en développement.

Le document final de Rio+20 intitulé «L’avenir que nous voulons» prévoit la création d’un groupe de travail, intergouvernemental et ouvert, chargé de soumettre un rapport lors de la 68e session de l’Assemblée générale (de septembre 2013 à septembre 2014), contenant une proposition d’ODD. Ces objectifs doivent tenir compte de manière équilibrée des trois dimensions du développement durable (sociale, économique et environnementale) et s’intégrer dans l’agenda de l’après-2015 des Nations Unies.

Contrairement aux OMD, formulés pour l’essentiel par des experts, le choix des ODD prioritaires sera l’aboutissement d’une vaste consultation à laquelle seront associés les Etats membres des Nations Unies et la société civile. Dans le même temps, toutes les institutions des Nations Unies collaborent à la définition de l’agenda de l’après-2015.

Procédures de consultation en Suisse

En Suisse, c’est la Direction du développement et de la coopération (DDC) qui est chargée de coordonner les consultations et de mener les négociations internationales sur l’agenda de l’après-2015. En 2012, elle a créé le Groupe de travail interdépartemental sur l’agenda après 2015, dans lequel sont représentés les offices fédéraux intéressés au dossier. Ce groupe a mené des consultations tant au sein de l’administration qu’avec l’économie privée, les institutions scientifiques et les ONG, afin que la Suisse puisse défendre une position reposant sur un large consensus lors des négociations internationales. Cette procédure de consultation achevée, le Conseil fédéral a adopté le 26 juin 2013 la position de la Suisse sur le programme de développement «post-2015» et sur les Objectifs de développement durable (ODD). En conséquence, la Suisse a défini quatre objectifs prioritaires qu’elle défendra lors des négociations internationales :

  • Sécurité de l’eau pour tous
  • Une meilleure santé à tous les âges
  • Egalité des genres
  • Paix et sécurité, surtout dans les Etats et régions en conflit

L’égalité des genres, un objectif prioritaire

En faisant de l’égalité des genres l’un de ses quatre objectifs prioritaires, la Suisse montre qu’elle est disposée à accorder une grande importance aux droits de la femme et à l’égalité des genres ainsi qu’à défendre cette position dans les instances internationales. Cette décision tombe à point nommé, 20 ans après la «Déclaration et le Programme d’action de Beijing» adoptés en 1995 par la quatrième Conférence mondiale sur les femmes. En effet, les objectifs définis à Beijing – concrétiser dans le monde entier l’égalité des genres, le développement et la paix pour les femmes – n’ont été atteints que dans une infime proportion. Pire, de nombreux acquis de 1995 sont en danger, de sorte qu’il est essentiel d’éviter tout retour en arrière. Dans ces circonstances, de nombreuses organisations internationales, parmi lesquelles ONU Femmes, œuvrent elles aussi pour que l’égalité des genres et l’autonomisation des femmes figurent parmi les objectifs prioritaires.

Suite du programme

La Suisse partage un siège avec la France et l’Allemagne au sein du Groupe de travail sur les ODD, créé en décembre 2012 par l’Assemblée générale de l’ONU. Les représentants de ces trois pays ont siégé pour la première fois le 20 juin 2013 à Berne (cf. le communiqué de presse du DFAE du 20 juin 2013). Ils se sont accordés sur l’importance d’allier leurs forces pour faire progresser le processus de consensus sur de nouveaux ODD au sein du Groupe de travail ouvert, qui présentera à l’Assemblée générale de l’ONU, durant la 68e session qui débute le 24 septembre 2013, un rapport contenant une proposition d’ODD. Il reste à savoir si les quatre priorités définies par la Suisse trouveront grâce aux yeux du Groupe de travail et si elles figureront parmi les priorités retenues par l’Assemblée générale.

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