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Autorisation pour l’ouverture d’une instruction pénale contre des policiers

Arrêt du Tribunal fédéral du 15 juillet 2011, 1B_77/2011

Abstract

Auteur : Andreas Kind

Publié le 26.10.2011

Pertinence pratique :

  • Si les cantons font usage du privilège d’exclure ou de limiter la responsabilité pénale des membres de leurs autorités (art. 7 al. 2 let. b CPP), ils sont libres de subordonner à l’autorisation d’une autorité judiciaire ou non judiciaire l’ouverture d’une poursuite pénale contre leurs membres.
  • Dans le cadre des décisions sur le traitement de plaintes pénales contre des fonctionnaires, il ne s’agit que d’une simple autorisation. La décision formelle quant à l’ouverture ou non d’une instruction pénale relève en tout cas de la compétence du Ministère public (art. 309 et 310 CPP).
  • Dans le cadre des procédures d’autorisation de poursuite pénale à l’encontre des membres de la police, seuls des arguments relevant du droit pénal peuvent être pris en compte. Les raisonnements de nature politique ne peuvent être pris en compte qu’à l’égard des membres des autorités cantonales de plus haut rang.

Possibilité d’un privilège cantonal de la poursuite pénale

L’art. 7 al. 2 let. b du Code de procédure pénale suisse (CPP) donne la possibilité aux cantons de prévoir dans leur législation un privilège de la poursuite, que l’on appelle également «l’immunité absolue relative», pour les membres de leurs autorités. Un tel privilège subordonne à une autorisation la poursuite pénale contre ces derniers pour des crimes ou des délits commis dans l’exercice de leurs fonctions. D’un point de vue procédural, il s’agit d’une condition à l’ouverture de l’action pénale. Le raisonnement qui se cache derrière ce mécanisme est, d’une part, la volonté d’apporter une protection contre les plaintes abusives et, d’autre part, de protéger l’intérêt public, afin d’éviter que le bon fonctionnement de l’appareil étatique ne soit bloqué par une multitude de plaintes quérulantes. L’art. 7 al. 2 let. b CPP prévoit que les cantons peuvent faire appel à une autorité non judiciaire pour émettre une telle autorisation.

Exposé des faits et historique du processus

Un homme a porté plainte contre trois membres du corps de police de la Ville de Zurich auprès du Ministère public de Zurich. Il a reproché aux trois policiers de l’avoir maltraité lors de son arrestation (lésions corporelles simples, éventuellement voies de faits). Le Ministère public compétent a alors transmis l’affaire, conformément au droit cantonal sur l’organisation judiciaire (§ 148 Gerichtsorganisationsgesetz, GOG/ZH), au Tribunal supérieur pour qu’une décision soit rendue sur l’ouverture ou non d’une instruction contre ces policiers. Le Tribunal supérieur n’est pas entré en matière sur la demande du Ministère public en invoquant le fait que le § 148 GOG/ZH contredisait l’art. 7 al. 2 let. b CPP, et que la demande était par conséquent nulle. Selon l’art. 309 f CPP, c’est au Ministère public lui-même qu’il incombe de décider de l’opportunité de l’ouverture d’une instruction. Le Procureur général du canton de Zurich a fait recours contre cette décision auprès du Tribunal fédéral.

L’arrêt

Le Tribunal fédéral a admis le recours en jugeant que c’était au Tribunal supérieur du canton de Zurich de décider de l’octroi de l’autorisation : le législateur fédéral, en introduisant l’art. 7 al. 2 let. b CPP, n’a certainement pas voulu exclure le recours aux autorités judiciaires. Cela d’autant plus qu’il en a lui-même prévu en partie au niveau fédéral. En outre, le Tribunal fédéral a mis l’accent sur le fait qu’en présence de l’immunité relative, l’autorité appelée à statuer ne rend qu’une décision quant à l’autorisation. L’opportunité de l’ouverture de l’action publique relève dans tous les cas de la compétence du Ministère public au sens de l’art. 309 f CPP.

Le Tribunal fédéral a apporté une précision intéressante au considérant 2.4. Selon sa jurisprudence rendue jusque-là (confirmée dernièrement dans l’ATF 135 I 113, p. 115, voir aussi les notes), non seulement des critères d’ordre pénal pouvaient être pris en considération, mais également des critères d’ordre politique. Dans l’arrêt présent, le Tribunal fédéral a précisé que ce principe ne s’appliquait qu’aux membres des autorités supérieures. Pour le reste du personnel de l’Etat, les considérations politiques ne sauraient être retenues. Cela ne serait pas défendable vis-à-vis du principe de l’égalité et serait en contradiction avec les dispositions applicables aux fonctionnaires fédéraux (art. 15 al. 3, Loi sur la responsabilité, LRCF). Dans les affaires concernant ces derniers, l’autorisation ne peut être refusée que s’il s’agit d’un cas de faible gravité et qu’une mesure disciplinaire semble déjà avoir sanctionné le faute de manière suffisante.

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