Études et rapports
Interprétation de la Convention d’Istanbul
Portée du principe de non-discrimination
Abstract
La Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (Convention d’Istanbul) est entrée en vigueur pour la Suisse début avril 2018. Dans un avis de droit sur mandat du Bureau fédéral de l’égalité entre femmes et hommes (BFEG), le CSDH expose la façon dont le principe de non-discrimination de la Convention d’Istanbul doit être interprété. Il répond en outre à la question de savoir si la Convention d’Istanbul s’applique aussi en cas de violence commise en dehors de la Suisse.
Obligation de soutien aux victimes d’infraction
En principe, il convient de noter que la Convention d’Istanbul s’applique essentiellement au territoire de l’État partie, c’est-à-dire qu’elle ne leur impose pas d’obligations extraterritoriales. Toutefois, la Convention d’Istanbul impose aux États parties de protéger et de soutenir toutes les victimes de violences liées au genre qui se trouvent sur leur territoire, même si la violence a eu lieu à l’étranger. C’est le cas par exemple lorsque la personne a été victime d’un viol, de violence domestique ou de mutilations génitales féminines dans son pays d’origine ou durant son voyage jusqu’en Suisse. Le statut de séjour de la victime en Suisse importe peu.
La loi suisse sur l’aide aux victimes d’infractions (Loi sur l’aide aux victimes, LAVI), qui restreint les prestations de soutien aux victimes quand la violence a eu lieu à l’étranger, ne semble pas conforme au principe de non-discrimination de la Convention d’Istanbul (art. 4 par. 3) aux yeux du CSDH. Les personnes migrantes sont, en effet, moins susceptibles d’avoir leur domicile en Suisse au moment où l’infraction a été commise en dehors de Suisse que les personnes de nationalité suisse ou déjà autorisées à résider en Suisse.
Violences à l’égard des « femmes » – à qui s’applique ce terme ?
Le CSDH relève que la Convention d’Istanbul distingue entre les violences domestiques d’une part, et les violences à l’égard des femmes d’autre part. Si les dispositions relatives aux premières peuvent également être appliquées aux hommes et aux garçons, pour autant qu’une approche sensible au genre reste préservée, les secondes ne concernent que les femmes.
Selon l’analyse du CSDH, la notion de « femmes » inclut les femmes mineures. Elle inclut toutes les personnes dont le « sexe » légal (inscrit à l’état civil) est femme et/ou qui s’identifient en tout ou en partie comme femmes, indépendamment de leur « sexe » légal. Elle protège donc par exemple les femmes trans qui n’ont pas procédé à une modification de leur état civil.
Par ailleurs, la Convention ne fait pas de distinction, pour ce qui est des mesures de soutien et d’assistance aux victimes, sur la base de l’identité ou de l’expression de genre d’une personne.